Le terme « femme politique » n’est pas encore assez répandu. À en croire les élues locales Sladana Zivkovic et Anne Erschens, notre territoire échappe (un peu) à la règle. Ouf ! Les deux candidates à la 1ere circonscription de Côte-d’Or en profitent pour parler présidentielles et législatives.
Quelle est la place des femmes dans les prochaines présidentielles ?
Sladana Zivkovic (PS), adjointe au maire de Dijon déléguée aux relations internationales.
Au-delà des présidentielles, il faut citer la loi sur la parité de 2000 qui pose le principe d’un égal accès des hommes et des femmes aux mandats électoraux. Cette loi, nécessaire et salutaire, demande encore à être bien appliquée. Dans le cadre des présidentielles, on ne peut que remarquer le peu de candidates dans le paysage, y compris pendant les primaires. En général, les positions de leadership, les postes à haute responsabilité restent masculins, certains partis préférant même payer des amendes qu’assurer la parité. La présence de femmes montre un progrès mais les candidates ne défendent pas toutes l’intérêt des femmes, c’est un effet de trompe-l’œil. Pour avoir travaillé sur les questions d’égalité des sexes au Conseil régional, je constate que toutes les avancées législatives ne suffisent pas lorsqu’on se penche sur la réalité des statistiques dans tous les domaines, politique compris. Les inégalités perdurent.
Anne Erschens (LR), conseillère départementale, ex-conseillère municipale à Dijon.
On ne peut pas nier que les femmes aient du mal à trouver leur place dans le monde du travail, dans les institutions, dans les postes à responsabilité et en politique. La femme y apporte un plus mais n’a pas besoin d’être revendicative, c’est surtout un problème de considération de la part de nos collègues masculins. Je ne suis pas favorable à la parité imposée, c’est un faux problème. Je me positionne plus pour un renouvellement global avec plus de femmes mais aussi en faisant une place à la société civile pour avoir de nouvelles têtes et des méthodes différentes. Pour les présidentielles, aussi bien chez Les Républicains qu’au Parti Socialiste, il n’y avait qu’une femme aux primaires. Cette situation est révélatrice que les comportements doivent changer. La femme en politique sert surtout de faire-valoir ou de bouclier. Dans le cas de Marine Le Pen, ce n’est pas le même schéma, il s’agit d’une position d’héritage familial et ce raisonnement ne convient pas à un parti traditionnel.
Et concernant le programme de votre candidat ?
Sladana Zivkovic
Je me réjouis que le programme du Parti Socialiste et de Benoit Hamon donne une place centrale aux droits des femmes, avec notamment l’augmentation du délai de prescription dans les cas de viol en le portant au-delà des 20 ans actuels. Ce programme met aussi en avant l’égalité salariale comme un objectif à atteindre à court terme. Il prévoit également la création d’un service public de la petite enfance permettant aux femmes d’avoir, si elles le souhaitent, un retour plus rapide à l’emploi. Je pense aussi à l’augmentation prévue des centres d’accueil du planning familial. Par contre, je suis inquiète de certaines propositions d’autres partis qui envisagent un retour en arrière sur des sujets aussi importants que le droit à l’avortement ou une vision très conservatrice de notre société, certains allant jusqu’à remettre en cause l’égalité salariale.
Anne Erschens
Le candidat Les Républicains a constitué un comité « Les femmes avec Fillon », les mettant ainsi au cœur de son projet avec des mesures pour lutter contre la violence faite aux femmes, la protection de l’enfant, les mères isolées… Après, il faut voir comment ce programme est traité et les actions qui en découlent. Le programme Les Républicains fait une large place à la famille, la place de la femme et de l’enfant. Concernant l’avortement, il ne prévoit pas de remettre en cause cette loi. François Fillon a précisé qu’il réviserait le droit d’adoption et qu’il s’opposerait à la gestation pour autrui.
Comment va la politique en Bourgogne ?
Sladana Zivkovic
On peut déjà se réjouir d’avoir une des rares femmes présidente d’un Conseil régional (ndlr, Marie-Guite Dufay). Je veux aussi souligner la réelle parité à la Mairie de Dijon, ce n’est pas juste une façade. D’autre part, les partis progressistes de gauche ont toujours œuvré pour les droits des femmes. Cela se traduit notamment par la parité aux élections départementales de 2015 avec des binômes homme-femme grâce à une réforme majeure, la loi du 17 mai 2013. Cette disposition a permis de féminiser le monde politique local. Toutefois, même si partout les choses évoluent dans le bon sens, il faut rester vigilant, continuer à ouvrir le débat sur l’égalité chaque fois que c’est possible.
Anne Erschens
Je trouve que la Bourgogne se débrouille bien. Quand on regarde l’ensemble des partis en présence, on constate, notamment pour les législatives, qu’il y a beaucoup de candidatures féminines. C’est rassurant, surtout quand on observe qu’au sein même de nos propres familles politiques, il est parfois difficile de s’imposer face aux ambitions masculines. En Bourgogne, les femmes sont présentes à des postes clés : Conseil régional, préfecture, rectorat, direction d’Engie, d’Orange… N’oublions pas de belles entreprises locales dirigées par des femmes. C’est un signal fort et positif. Les femmes apportent un autre état d’esprit, plus pragmatique, avec le souci de la rentabilité. C’est dans le sens de cette rentabilité et d’exemplarité que j’ai choisi de démissionner de ma fonction de conseillère municipale car je crois au non-cumul des mandats pour se consacrer à celle que l’on occupe. Sans parler de féminisme, je suis une femme engagée et soucieuse de l’égalité et de la place des femmes dans notre société. Elles apportent de la complémentarité et de la nouveauté, elles sont un peu moins dans le combat et l’égo.