La 16e édition du concours régional Initiative au féminin, co-organisé par l’État et la Région, a récompensé cinq créatrices d’entreprise dont deux dans le secteur du bâtiment, où les femmes ne représentent qu’un petit 12 % des effectifs : Camille Raboutet et Laure Houmard. Rencontre.
Camille Reboutet, ouvrière durable
Premier prix du concours Initiative au féminin, Camille Raboutet a préféré l’univers de la construction à celui de la culture. Spécialiste des isolations au chanvre et à la chaux, elle réalise des bâtiments durables tout en se fabriquant un avenir.
Girondine d’origine, Camille Raboutet part en Bretagne pour un service civique dans un collectif de musiciens. Au sein d’une « ferme culturelle », elle découvre par hasard ses premières maisons en paille et en chaux. « Un premier déclic. » Trois ans plus tard, elle entame une formation d’ouvrière professionnelle en écoconstruction – presque la moitié des stagiaires sont des femmes. « Je voulais être capable de fabriquer moi-même ma petite maison et d’être le plus autonome possible. » En accord avec ses valeurs, elle choisit de se tourner vers d’autres modes de construction. « Je voulais apporter ma pierre à l’édifice, avec des techniques alternatives. » Pendant un an, elle enchaîne les petits boulots, entre la Bretagne et la Bourgogne où la mènent les imprévus de la vie.
En 2021, malgré ses appréhensions, elle se fait confiance et se met finalement à son compte en créant Kam Isole & Co, à Quarré-les-Tombes (Yonne). Un choix judicieux puisque le bouche-à-oreille fait son œuvre. Sur les chantiers d’enduit ou d’isolation à la chaux et au chanvre, elle invite ses clients à participer. « Ils ont envie de faire mais ils ont besoin qu’un sachant leur explique et leur apporte les compétences. Ils me fournissent la main-d’œuvre nécessaire. » Au quotidien, son statut de femme dans un métier réputé masculin ne pose aucun problème. Elle s’en amuse même. « Dans les magasins de matériaux, les hommes me proposent de porter les sacs de chanvre à ma place mais je leur explique que je suis capable de le faire aussi bien qu’eux. » Comme d’autres confrères le lui ont enseigné, elle a développé des astuces pour se préserver, réfléchit ses chantiers afin d’économiser son énergie. Aujourd’hui, elle s’épanouit dans son travail. « Je trouve gratifiant de construire de mes mains avec des matériaux respectueux de l’environnement. »
Laure Houmard, compagnonne malgré tout
Finalement, la science n’était pas son truc. Laure Houmard a changé de voie pour se lancer dans la menuiserie. Mais pour réussir, elle a dû faire preuve de persévérance. Une volonté récompensée : elle a créé son entreprise en juillet 2021 et reçu le 2e prix du concours régional initiative au féminin 2021.
Un ébéniste à deux pas chez elle, à Paris, lui a transmis sa passion du bois. Alors Laure Houmard abandonne ses études de physique et suit ses traces. « Les inscriptions se faisaient un an sur deux et ce n’était pas la bonne année. » Elle ne renonce pas pour autant à assouvir son goût pour les métiers du bois et rejoint le centre de formation des apprentis des compagnons en menuiserie. Particulièrement motivée, elle intègre la deuxième année quelques mois après son entrée, se consacrant des heures durant à la pratique. Le CAP en poche, elle veut entamer son tour de France. « J’ai dû contacter 150 entreprises pour que la dernière de ma liste, à Argenteuil, accepte de prendre une fille. » Elle a bien failli baisser les bras, mais sa famille l’a soutenue. Puis son premier employeur lui a également ouvert la porte de l’entreprise suivante. Entre 2005 et 2011, son tour de France a été marqué par l’obtention d’un brevet professionnel, mais aussi par quelques difficultés. « À Albi, alors que c’était encore le début des femmes dans le compagnonnage, un responsable a tout fait pour que je ne trouve pas d’entreprise d’accueil, alors je suis partie. »
Heureusement, entre Toulouse, Nîmes et Nantes, elle trouve des esprits ouverts, plus sensibles à ses compétences qu’à son genre. Aujourd’hui, Laure Houmard se réjouit que les mentalités évoluent. Elle dirige son entreprise avec un associé, Pierre Benedetti, rencontré pendant son tour de France. Installée à Vars (Haute-Saône), la menuisière s’épanouit dans son métier en prêtant une attention particulière au développement durable et en promouvant les bois locaux.
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